Frais de logement adapté

4 mai 2021



Ce poste prend en compte tous les besoins d’achat, d’agrandissement, ou d’adaptation d’un logement, liés aux atteintes corporelles de la victime.  

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I. Définition

❖        Rapport Dintilhac

 « Ces dépenses concernent les frais que doit débourser la victime directe à la suite du dommage pour adapter son logement à son handicap et bénéficier ainsi d’un habitat en adéquation avec ce handicap.

 

Ce poste d’indemnisation concerne le remboursement des frais que doit exposer la victime à la suite de sa consolidation, dans la mesure où les frais d’adaptation du logement exposés, à titre temporaire, sont déjà susceptibles d’être indemnisés au titre du poste de préjudice “Frais divers”.

 

Cette indemnisation intervient sur la base de factures, de devis ou même des conclusions du rapport de l’expert sur la consistance et le montant des travaux nécessaires à la victime pour vivre dans son logement.

 

Ces frais doivent être engagés pendant la maladie traumatique afin de permettre à la victime handicapée de pouvoir immédiatement retourner vivre à son domicile dès sa consolidation acquise.

 

Ce poste de préjudice inclut non seulement l’aménagement du domicile préexistant, mais éventuellement celui découlant de l’acquisition d’un domicile mieux adapté prenant en compte le surcoût financier engendré par cette acquisition.

 

En outre, il est possible d’inclure au titre de l’indemnisation de ce poste de préjudice les frais de déménagement et d’emménagement, ainsi que ceux liés à un surcoût de loyer pour un logement plus grand découlant des difficultés de mobilité de la victime devenue handicapée.

 

Enfin, ce poste intègre également les frais de structure nécessaires pour que la victime handicapée puisse disposer d’un autre lieu de vie extérieur à son logement habituel de type foyer ou maison médicalisée. »

❖        Cour de cassation 

-          Cass., civ., 2ème, 3 novembre 2011, n°10-26.997 : la victime peut solliciter au titre des frais de logement adapté, les frais d’acquisition du terrain, le coût de la construction du bien ainsi que les honoraires de l’agent immobilier.

 

-          Cass., civ., 2ème, 14 avril 2016, n°15-16.625 et n°15-22.147, publié au Bulletin : la réparation intégrale du préjudice lié aux frais de logement adapté commande que l’assureur « prenne en charge les dépenses nécessaires pour permettre à la victime de bénéficier d’un habitat adapté à son handicap ».

 

-          Cass., civ., 2ème, 2 février 2017, n°15-29.527 : la victime est fondée à solliciter l’indemnisation de « l'acquisition d'un logement mieux adapté (…) en relation avec l'accident pour avoir été rendue nécessaire à raison du handicap de la victime et du mode de vie qu'il lui impose ».

 

-          Cass., civ., 2ème, 18 mai 2017, n°16-15.912 ; Cass, civ., 2ème, 23 mai 2019, n°18-16.651:  dès lors que l’état séquellaire de la victime, locataire, rend nécessaire l’acquisition d’un logement du fait de la lourdeur des aménagements nécessaires, les frais d’acquisition dudit logement, doivent être intégralement pris en charge par le débiteur de l’indemnisation.

 

-          Cass., civ., 2ème, 5 octobre 2017, n°16-22.353 : aménagement du logement des parents et du frère de la victime, dont le logement principal a lui-même été aménagé. La victime se rendant régulièrement chez ses proches avant l’accident, ces derniers ont été indemnisés de l’aménagement de leur logement pour pouvoir recevoir la victime.

 

-          La jurisprudence n’est cependant pas systématique sur la prise en charge de l’acquisition du logement. Ainsi, des arrêts apparemment contraires ont été rendus sur l’acquisition du logement.

 

·         Cass., civ., 2ème, 28 février 2013, n°12-13.816 : l’indemnisation du poste est limitée à l’aménagement du logement, sans prendre en compte le coût d’acquisition. La victime n’ayant pas de logement avant l'accident, elle vivait chez ses parents et aurait dû nécessairement au cours de sa vie, exposer des dépenses pour se loger.

 

·         Cass., civ., 2ème, 18 mai 2017, nº 16-15.912, Publié au bulletin

La victime qui « était âgé de 26 ans au jour de l'accident, résidait au domicile de ses parents, lequel est devenu inadapté aux besoins de son handicap, que l'importance de ce handicap et l'usage permanent d'un fauteuil roulant justifient, selon le rapport d'expertise, des aménagements du logement suffisamment lourds pour qu'ils soient incompatibles avec le caractère provisoire d'une location, que le changement de lieu de vie n'est donc pas un choix purement personnel mais a été provoqué par les séquelles de l'accident ».

 

II. Contenu

S’agissant d’une mission d’expertise médico-légale, il n’appartient pas au médecin d’évaluer stricto sensu ce poste de préjudice, mais d’en caractériser l’existence. Il conviendra éventuellement de renvoyer à une expertise architecturale et/ou ergothérapique pour son évaluation.

Dans la mesure où ce poste de préjudice nécessite parfois une élaboration très en amont, il sera envisagé sans tenir compte de la date de consolidation (délais d’étude préalable, d’achèvement du projet d’aménagement, acquisition de terrain ou bâtiment…).

Il appartiendra aux régleurs de corréler les dépenses aux postes de préjudices correspondants (frais divers / logement adapté post consolidation).

1)    Nature :

Les besoins de la victime peuvent revêtir des formes très variées, à titre d’exemples et de manière non exhaustive :

 a)      Le ou les lieux de vie 

-          Frais de location temporaire,

-          Frais d’hébergement en structure,

-          Frais de déménagement,

-          Nécessité d’un nouveau logement,

 

b)     Les aménagements 

-          Accessibilité extérieure ou intérieure en fauteuil roulant,

-          Lieux dédiés à l’accueil d’une tierce personne (salle de bain et WC personnels, chambre),

-          Rampes d’appui (salle de bains, WC, escaliers…),

-          Rampes d’accès à l’intérieur et l’extérieur,

-          Rails de plafond pour lève malade,

-          Aménagement de la salle de bains (personnelle ou partagée),

-          Cuisine adaptée,

-          Agrandissement des passages et des circulations dans chaque pièce (fauteuil roulant manuel ou électrique),

-          Accès à l’étage (ascenseur, monte escalier, monte-charge),

-          Aménagement extérieur (terrasses, cheminement…),

-          Local de stockage du matériel,

-          Equipements de sécurité,

-          Equipements domotiques divers,

-          Climatisation réversible,

-          …

 

Il convient de rappeler que ce poste doit s’apprécier au regard de la réparation intégrale incluant les principes de dignité, de sécurité et de pérennité de l’environnement de la victime dans toutes ses composantes géographiques, sociales, et familiales.

 

2)    Étendue 

 La gravité des atteintes physiques n’est pas une condition de reconnaissance du poste.

La notion d’accessibilité s’étudie in concreto et non par référence aux normes d’accessibilité en construction. Un logement répondant aux critères de la loi du 11 février 2005 ne tient compte que d’aménagements minimaux, ne permettant pas de rétablir la victime dans des conditions d’existence conformes à son mode de vie antérieur et à ses nouveaux besoins.

De la même façon, une victime doit pouvoir recevoir ses proches à domicile, a fortiori si ces derniers ne peuvent l’accueillir, compte tenu de ses lésions.

S’agissant des mineurs, le domicile familial, voire celui de chacun de ses parents si ces derniers sont séparés, doit être adapté à l’invalidité du mineur. Ces aménagements ne peuvent venir limiter le propre logement adapté de la victime devenue majeure.

 

III. Mission d’expertise

Dire si l’état de la victime, avant ou après consolidation, emporte un besoin temporaire ou définitif de logement adapté ;

Le cas échéant, le décrire ;

Sur demande d’une des parties, l’avis du médecin pourra être complété par une expertise architecturale et/ou ergothérapique ;

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IV. Méthode d’évaluation


L’expert doit :

•         Décrire l’habitat l’environnement géographique, social et familial de la victime,

•         Décrire le projet de vie de la victime,

•         Lister précisément les besoins de la victime par période temporaire ou permanente (voir liste

au paragraphe II).

Il ne doit pas effectuer le calcul indemnitaire.

En principe, l’examen de ce poste ne doit pas minorer l’évaluation des autres postes de préjudice tels que la tierce personne. C’est ainsi que les aménagements domotiques ne peuvent avoir pour fonction de limiter l’évaluation de la tierce personne, pour des raisons de dignité, de sécurité et d’humanité. 


 

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